Le jazz impressione. C’est un fait. Et Miles Davis s’est toujours fait un malin plaisir de découdre le canevas nébuleux du genre, de l’emmener sur un terrain vague musical et de faire feu des conventions. La fusion jazz ici est forcément rock, l’album date de 70, et alors que les oreilles se consument de psychédélisme, Bitches Brew s’embrase dans un transport presque chamanique, comme une complexe cacophonie incantatoire et géniale. On ne comprend pas tout, pas besoin, l’effet est viscéral, férocement sensuel. Entouré des meilleurs, comme à son habitude, Davis déconstruit, transcende et charme, avec votre consentement ou pas. S’encanaille aussi, fini les looks de garçon coiffeur bien peigné, il a bien desserrée sa cravate, troqué les costumes trois pièces pour les pattes d’éph’. Peut-être même partagé deux trois cigarettes magiques avec Hendrix – Miles Runs the Voodoo Down, claire allusion à son pote, le marabout électrifié – d’où l’arrivée des guitares électriques dans ses compositions. Enthousiasmé par les spasmes érotiques de James Brown, son jeu gagne en agressivité sexy. L’hédonisme est à la fête : improvisation faussement décousue, les morceaux presque tantriques s’étirent parfois sur des faces entières – Pharaoh’s Dance et Bitches Brew. Masterisée à partir des bandes originales – du master analogique 1/4″ / 15 IPS, vers DSD 64 – et strictement numérotée et limitée, cette ultime réédition double SACD ne laissera personne indifférent, ça c’est certain.

-★- TRACKLIST -★-

1. Pharaoh’s Dance
2. Bitches Brew
3. Spanish Key
4. John McLaughlin
5. Miles Runs the Voodoo Down
6. Sanctuary