New York Dolls – New York Dolls – 180 g. 45RPM – 2LP

Le cocktail explosif d’attitude, d’énergie et d’outrance qui se dégage du premier album éponyme des New York Dolls est parfaitement perceptible sur la pochette de l’album. Illustrant le quintette de travestis dans ses vêtements clinquants et trashs caractéristiques, l’album de 1973 a effrayé un nombre considérable d’auditeurs potentiels tout en captant l’attention d’un public assez large qui a reconnu le groupe pour ce qu’il était : des pionniers du zeitgeist qui ont contribué à développer les mouvements punk et glam rock.

Considéré respectivement 301ème et 49ème plus grand album de tous les temps par Rolling Stone et Mojo, New York Dolls bénéficie du traitement audiophile que l’on attendait depuis longtemps sur cette double édition numérotée 45 RPM 180g Mobile Fidelity. Issue des bandes originales et pressée chez Fidelity Record Press en Californie, cette version collector marque la première fois qu’il est possible de se procurer l’album fondateur du groupe en qualité audiophile. 

Loin de présenter les éléments rustres qui ont été associés à la scène punk, New York Dolls bénéficie d’une production soignée supervisée par Todd Rundgren. Bien que plus habitué à travailler avec des musiciens de haut niveau, Rundgren, plus séduit par le charisme et la coolitude des New York Dolls que par leur technique instrumentale, comprenait parfaitement le style du groupe.  Il a capturé ce qui s’est passé au Record Plant de New York avec le bon mix de sensation live, d’authenticité brute et d’acuité professionnelle. 

Sur cette réédition exceptionnelle de Mobile Fidelity, vous pouvez entendre ces facettes ainsi que des détails cruciaux, des dynamiques et des textures avec une précision inimaginable jusqu’à présent. Rundgren a préservé des degrés généreux de crasse, de saleté et de fiel tout en accordant à la musique rauque les niveaux élevés de séparation, de solidité et d’impact que mérite tout enregistrement marquant. Sa vision s’étend à l’introduction d’accents choisis – notes de piano de bar, passages de synthétiseur Moog, saxophones klaxonnants de Buddy Bowser – qui ajoutent à l’attrait des chansons sans interférer avec la structure originale. 

Grâce à un espace de groove supplémentaire sur ce pressage, le ténor, la présentation et l’attaque du chanteur David Johansen et des guitaristes désormais iconiques Johnny Thunders et Sylvain Sylvain sont d’une vigueur et d’une vitalité stupéfiantes. Les New York Dolls semblent souvent sortir des rails et s’enfoncer dans le rouge, mais d’une manière ou d’une autre, la prestance, le déhanchement et le laisser-aller – ainsi que le glauque, le débraillé, la frénésie et la fébrilité que ces caractéristiques impliquent – restent unis dans un ensemble qui brandit son poing collectif contre les frustrations, l’isolement, le désarroi et la désillusion du chaos de la jeunesse et de la décadence urbaine.

En commençant avec « Personality Crisis », classée par Rolling Stone parmi les 500 plus grandes chansons de tous les temps, le groupe met en évidence sa compréhension de l’aliénation, de la déviance, du déséquilibre et de la désaffection suburbaine, ainsi que sa capacité à jouer du boogie, du rock’n’roll bruyant et de la pop inspirée du Brill Building. Les New York Dolls et leur rouge à lèvres possèdent des caractéristiques que beaucoup de leurs prédécesseurs plus durs négligeraient : la joie de vivre et la mélodie, ainsi qu’un don pour savoir exactement où amener une chanson en trois minutes et demie. 

Plongez et foncez avec le belliqueux « Looking for a Kiss »  ; tapez du pied et des mains sur le refrain de « Jet Boy » ; abandonnez-vous aux exigences et aux provocations du codé « Vietnamese Baby » ; décidez si « Bad Girl » aspire à l’explosion ou à l’implosion. C’est l’un des nombreux morceaux qui font allusion à la fin du monde. Bien sûr, cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas assez de temps pour une aventure avant que tout ne brûle. « Je n’ai nulle part où aller », hurle Johansen. Et il est sincère. 

Paré de sonorités réjouissantes, pailletées et grinçantes, New York Dolls est fier de son audace et de sa brutalité. Cet album turbulent, qui a valu au groupe d’être élu à la fois « meilleur et pire nouveau groupe de l’année » dans les pages de Creem, fait preuve d’une grande révérence pour le blues, sans pour autant démesurément attirer l’attention sur ce style.  Le très folk « Lonely Planet Boy » n’est rien d’autre qu’une collision d’émotions à fleur de peau et de désir, face aux injonctions de maintenir une apparence de dureté. L’interprétation de « Pills » de Bo Diddley, avec son harmonica frissonnant et ses rythmes claquants, annonce qu’il n’y a pas de remède à ce qui infecte ce groupe. C’est contagieux. En effet!

Avec ses interprétations débordant d’humour, d’irrévérence et de décadence, Johansen est l’équivalent d’une bouche d’incendie ouverte qui jaillit à volonté. Il est à la fois tendre et vicieux, sérieux et pince-sans-rire. Le phrasé, la passion et l’ambiguïté lyrique de Johansen font de « Trash » un joyau glam-rock insistant, dont les harmonies en écho et les références aux groupes de filles en font un classique de la pop. 

Too much too soon? Seulement pour ceux qui ne veulent pas entendre parler de l’un des plus beaux albums de rock ‘n’ roll jamais enregistrés.