Ah le deuxième album. Sacerdoce pour toute formation musicale au premier essai transformé. Un vertige du vide, une injonction à la survie, confirmation ou infirmation potentielle d’un statut fragile. Ratez votre truc, et vous vous retrouverez illico crucifié sur le Golgotha du rock. Pour les gentils petits gars d’Eagles, le succès fut tout aussi fourbe qu’il fut euphorisant. Fini la candeur des débuts, la fraicheur idéaliste s’est faite avaler toute crue par le grand banditisme de l’industrie du disque. Quoi de plus logique alors que d’aller piocher dans l’imagerie d’un far west fétichisé, d’endosser des nippes cradingues de desperados, des mines burinées d’antihéros à la Sergio Leone, et de chevaucher un canasson éreinté à travers le canyon brulant du rock’n’roll? Pari casse-gueule, album pas vraiment conceptuel, mais entièrement articulé autour d’un thème fondateur de l’identité américaine, Desperado déroule le film du western duquel les Eagles se fantasment protagonistes : vagabonds troubadours errant de saloon en saloon, poètes ignorés par la clientèle rustre de truands sans foi ni loi de ces bouges enfiévrés. Ambitieux, Desperado se veut bien plus abouti que son prédécesseur, ces crypto-hors la loi ont mis le pied à l’étrier, y a pas à tortiller. Voilà donc un album bourré d’allégories, rock stars deviennent bandits, et pas besoin de cogiter bien longtemps quant à qui joue les shérifs véreux. Des références appuyées aux brigands mythiques du genre – Doolin-Dalton – et à l’espérance de vie dérisoire de ces mecs-là – Twenty-One – des sonorités bluegrass, du banjo et de l’harmonica, tissent un décor sec et poussiéreux que Sam Peckinpah n’aurait pas renié – Outlaw Man. Mélodies et voix, sereinement rebelles, désaltèrent ces gueules cassées au bec desséché par le tabac à chiquer et la bière tiède – Tequila Sunrise – et réconfortent les filles de joie cabossées coincées là – Saturday Night, A Certain Kind Of Fool.

Limitée à 7 500 exemplaires numérotés, pressée sur SuperVinyl MoFi à RTI et masterisée à partir des bandes originales analogiques – du master analogique 1/4″ / 15 IPS, vers DSD 256, vers console analogique, vers tour – l’édition collector ultra-hi-fi UltraDisc One-Step 180g 45RPM 2LP Mobile Fidelity de Desperado rend hommage à un album mémorable, à la cinématographie terriblement palpable.

-★- TRACKLIST -★-

1. Doolin-Dalton
2. Twenty-One
3. Out of Control
4. Tequila Sunrise
5. Desperado
6. Certain Kind of Fool
7. Doolin-Dalton
8. Outlaw Man
9. Saturday Night
10. Bitter Creek
11. Doolin-Dalton/Desperado